28.3.15

Fausse couche, l'attente est terminée



L'attente est terminée.
Je n'aurai plus l'occasion de compter les semaines inlassablement, jusqu'au moment de l'échographie du 1er trimestre, de tes premiers coups dans mon ventre, de la délivrance à la maternité, de tes premiers pleurs dans ton berceau de retour à la maison.


Tout s'est arreté hier pour l'échographie de datation, une "simple  formalité". 


Prescrite par ma gynécologue pour me rassurer alors que je lui exprimais mon inquiétude face à des douleurs abdominales inattendues et inconnues jusqu'alors, quelques saignements après un moment d'amour avec ma moitié. Après examen manuel, pas de quoi s'inquiéter. Pas d'inquiétude à avoir alors que les femmes de ma famille connaissent des problèmes de fausses couches à répétitions ( 6 pour ma mère, 2 pour ma tante). Pas de quoi s'inquiéter. Les facteurs génétiques liés à la fausse couche ne concerne que 1 à 3% des femmes.

Pas de quoi s'inquiéter. Malgré ce jour, il y a à peu près 2 semaines, où j'ai été alertée, envahie par une infinie tristesse, avec la sensation qu'il/elle n'était plus là. Un sentiment ineffable, un vide, une détresse ineffable...Mais ce n'est rien, ce ne sont probablement que des hormones de grossesse. Mais ce jour, j'ai senti en moi se creuser un abîme, une grande vague de détresse.
Etant d'un naturel assez stressé, j'ai fini par me raisonner, en me disant que ce n'était probablement rien...Et les symptômes de grossesse ont repris leur bonhomme de vie, car j'avais tant envie d'être mère. Je me sentais tellement prête à donner la vie, à endosser la responsabilité du confort et du bien-être qu'un autre que moi, je me sentais suffisamment forte pour construire un nid d'amour avec mon compagnon. Mon " partenenaire in crime".

Mais ça c'était avant.

Avant l'entrée dans le cabinet d'échographie obstétrique, avant l'application du gel sur mon bas-ventre, avant le silence gêné de la sage-femme, avant les questions, et les va-et-vient de l'appareil sur mon ventre pour retrouver trace d'un petit coeur qui bat. Avant de ne voir qu'il n'y a plus rien à voir. Avant le trou noir.

J'ai assez peu de souvenir précis de la suite. Sidération, honte et larmes. Coup de fil à mon gynécologue, rendez-vous pris en début de semaine prochaine. Je peux/dois aller aux urgences en cas d'hemorragie. Mon homme m'entoure de ses bras, je me love dans son amour, dans ses paroles réconfortantes. Ce n'est pas ma faute, ce n'est pas notre faute, on aura la chance de pouvoir accueillir un autre enfant. C'est la vie. Je pense qu'il est aussi triste que moi, qu'il est affecté par la perte de notre futur enfant, mais c'est un roc. Il joue le rôle de celui qui ne flanche pas.

Les fausses couches précoces touchent une femme sur cinq. Elles sont d'autant plus fréquentes lorsqu'il s'agit d'une première grossesse. J'ai l'impression que c'est un tabou d'évoquer ce fait. Il a parfois fallu 3 ou 4 ans pour que certaines copines m'avouent avoir subi ce traumatisme. Car, oui, c'est traumatisant.

J'ai découvert hier que j'avais des fibromes

Dès le début de ma grossesse (et avant même d'avoir fait un test urinaire, et une prise de sang), j'ai ressenti des douleurs prononcées du côté gauche. D'ailleurs c'est une des premières choses que j'ai dites à l'échographiste avant d'apprendre la mauvaise nouvelle...J'ai compris hier que je n'avais pas de symptômes psycho-somatiques. J'avais ces douleurs car j'avais plusieurs fibromes sur la paroi gauche de mon utérus.
Les fibromes peuvent causer notamment:

  • des règles abondantes et douloureuses (c'est mon cas depuis ma plus tendre adolescence)
  • des douleurs dans le bas du ventre et le bas du dos
  • des douleurs pendant les rapports sexuels
  • des arrêts de grossesse précoces
Dans mon cas, c'est un petit coktail de tout ça. Au lieu de ressentir de l'angoisse, je me sens plutôt presque soulagée d'apprendre que pour certains maux qui sont les miens depuis plusieurs  années, il peut y avoir un début d'explication.
Ce n'est pas ma faute, c'est un facteur génétique...En effet, il semblerait que pour une population de femmes de 35 ans, un peu plus de 20% des femmes blanches sont porteuses de fibromes, alors que ce taux peut atteindre les 50% chez les femmes d'origine subsaharienne. Je l'ai lu sur le web, et la sage-femme hier m'a interrogée sur mes origines, en m'informant de ce fait.

Il est 9h08. Cela fait 18h que je sais que je ne suis plus maman. Hier après-midi le soleil brillait, ce matin les rayons du soleil viennent me chatouiller la nuque, les doigts. La vie continue. J'ai perdu une vie en devenir hier. Mais j'ai quand même l'espoir de pouvoir donner la vie un jour.

Vous racontez cet épisode m'a fait du bien. J'ai pu prendre une certaine distance avec les événements.

Je disais au début du billet que l'attente était finie. Elle ne fait au contraire que commencer. J'attends une expulsion/fausse couche naturelle, ou j'attends de voir mon gynécologue pour qu'elle me prescrive des pilules abortives.

J'attends d'avoir à nouveau suffisamment confiance pour envisager de redevenir une compagne/maman.

J'attends aussi un peu secrètement que quelqu'un de l'autre côté de l'écran me fasse part de son expérience, et me dise que tout est encore possible...




7 commentaires:

  1. Bien sûr que tout est encore possible ;) C'est malheureusement quelque chose de très fréquent. Cela ne soulage pas spécialement sur le coup, mais t'aidera peut être à aller de l'avant.
    J'ai fait une fausse couche à 2 mois de grossesse. Ça nous est tombé dessus comme ça. On va aux urgences, on nous annonce la nouvelle, on rentre chez nous... et on sent ce vide... pas que dans son ventre. Dans son coeur aussi...
    Et puis un jour (2 ans pour moi), on retombe enceinte. On a un peu peur au début, on a du mal à se laisser aller à être content de la situation. Puis le 3eme mois passe, on se détend. On vit sa grossesse a 100%. Le bébé arrive, et là... la fausse couche ne semble plus qu'un lointain souvenir, qu'on oublie pas, mais avec lequel on compose.
    Quand je regarde ma fille, je me dis que ça devait être comme ça. Que ça n'était pas le bon. Que c'est logique.
    Courage en tout cas pour les semaines difficiles qui t'attendent, qui VOUS attendent (on oublie souvent le papa dans l'histoire, mais lui aussi a perdu un espoir d'enfant), et je t'assure que la roue va tourner. <3

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    1. Merci cad de partager ton expérience...Mon homme est un roc, qui manifeste peu ses émotions (en tout cas les négatives), même si je sens qu'il est lui aussi affecté. Pour le moment, je me dis qu'il faut laisser du temps au temps avant de repenser à un autre projet bébé. Savoir que pour toi, ça s'est bien passé la 2e fois est un peu une lueur d'espoir

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  2. C'est courageux de nous partager un pan de ta vie. Bon courage à vous pour affronter cela. Mais oui tout est possible, tu dis que ta maman a eu 6 fausses couche et elle t'as eu…TOI!
    Je n'ai jamais encore été enceinte, donc je ne peux me mettre à ta place, mais je compatis avec ta douleur. Il va falloir t'armer de courage et de patience. Quand on fait une FC souvent c'est que le foetus n'était pas viable ou présentait des malformations, donc ne t'inquiètes pas tu auras la chance de connaître un bébé en parfaite santé. Excuse moi si je suis maladroite. Courage à vous.

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  3. Ne t'inquiète pas tu n'es pas maladroite. Merci d'avoir pris le temps de te pencher sur mon histoire. J'alterne vraiment en ce moment entre désolation et espoir. C'est en effet une sale période, mais ça passera...Merci pour ton soutien

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  4. piouf...j'ai le coeur serré...Je découvre ton blog par ce billet très émouvant... Toutes mes condoléances. Je n'ai pas connu ce malheur mais comme toute femme enceinte j'eu eu cette terrible peur de la fausse couche.
    Je te souhaite beaucoup de courage et d'amour <3

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  5. Chere chermininous,
    J'ai découvert ton blog par ton cv décalé...puis j'ai lu tes posts grossesse, et enfin ta magnifique lettre à tes parents.
    Si tu savais comme je me sens à présent proche de toi! Tout comme toi, j'ai vécu dans une famille dysfonctionnelle, qui m'a forcé à être adulte très tôt. Tout comme toi, j'ai vécu très chichement, sans beaucoup de perspective d'avenir. Tout comme toi, j'ai une petite soeur avec laquelle j'ai eu une relation fusionnelle, maternernante...et tout comme toi, j'ai du partir pour me construire. Tout comme toi, j'ai vécu à Valence...bref, tu m'as donné beaucoup de courage avec ta belle lettre, même si tes parents ne la liront jamais...

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  6. Chère Poids Plume, je découvre ton blog parce que tu as aimé un de mes articles sur Hellocoton... et je suis désolée de te "lire" dans de telles circonstances. Mon histoire n'est pas tout à fait la même que la tienne mais moi aussi, mon bébé s'est envolé il a très peu de temps et j'en éprouve encore beaucoup de tristesse. Je ne rentrerai pas dans les détails ici mais, si tu le souhaites, on peut en parler en privé.
    En tout cas, je voulais te dire que, même si la douleur est grande, tu ne dois pas perdre espoir d'être maman. C'est la plus merveilleuse des expériences de la vie même si elle est parsemée d'embûches, quel que soit le stade de ta vie de mère...
    Je t'embrasse bien fort,
    Sandra

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