La grande Maryse Condé
Une fois n'est pas coutume, j'arrive en 2e partie de soirée à tomber sur autre chose qu'un programme abrutissant des chaînes TNT. Et puis, je me dit que justement, parce que c'est programmé à une heure tardive, ça doit être un programme qui en vaut la peine (et oui, les intellos insomniaques ont, eux aussi, droit à un peu d'antenne...malheureusement, ça ne rapporte pas des masses en régie publicitaire...Mais je m'égare).
Première nouvelle, j'apprends que cette émission a pour cadre "2011, année de l'outre-mer". Tiens, grande nouvelle, je n'étais pas au courant! Mieux vaut tard que jamais! Mais pas de bol, on est en décembre, plus grand chose à se mettre sous la dent! En farfouillant dans les confins de mon esprit, je crois me souvenir qu'on a catapulté 2011 année des ultramarins, après un incident diplomatique avec le Mexique, auquel cette année était dévolu!
Deuxième nouvelle, je tombe amoureuse du parcours et de l'itinéraire professionnel de Maryse Condé, une femme de premier plan de la littérature française/ francophone (choisissez l'adjectif qui sied le mieux à votre idéologie).
Des bribes de la vie de Condé
Maryse Condé est une femme écrivain, née en Guadeloupe en 1937. Après de brillantes études en classes préparatoires littéraires dans un lycée parisien, elle découvre l'altérité blanc/noir dans les années 1950. Elle se prend donc d'une folle passion pour l'Afrique et épouse un comédien africain à la fin des années '50. Elle abandonne la Métropole et ses doucereuses promesses pour suivre son époux sur le continent.
Elle y fera une carrière d'enseignante qui la conduira notamment sénégalais et guinéen. Elle sera frappée sur place de la disymétrie et du gouffre qui séparent ces idéaux et la réalité de la vie en Afrique. Elle se démène sang et eau pour subvenir aux besoins de sa famille: Mamadou Condé, son époux, lui ayant donné 4 enfants.
Lassée de privations, de désillusions, elle quitte époux et foyer pour se réfugier dans un pays limitrophe et échapper à ses conditions de vie difficiles. Elle divorce. C'est sur son lieu de travail, qu'elle retrouvera l'amour en la personne de Richard, un enseignant anglais blanc. Ils braveront les interdits en s'unissant et en menant une relation sur un pied d'égalité. Il lui apportera la sérénité nécessaire qui lui permettra de se lancer dans l'écriture, et de questionner toutes les contradictions et les combats intérieurs qui la tenaillent.
Maryse Condé, qui gardera le nom de son premier époux, aiguise sa plume et livre au public de façon très régulière depuis les années '70 de troublants romans qui évoquent la question des races, de la sexualité à travers différents lieux et fresques historiques.
Elle a reçu pour se travaux la distinction de "commandeur des arts et des lettres" en 2001 et celle d'officier de l'Ordre National du Mérite en 2011. C'est notamment sur une de ses propositions que le président Chirac fait du 10 mai, le jour de la commémoration de l'esclavage.
Christine Taubira, Maryse Condé, Nicolas Sarkozy
crédits photos ministère de l'Intérieur
Elle continue aujourd'hui à écrire et à donner des cours et conférences notamment à la l'université de Columbia de New York.
J'ai cru découvrir Condé ce soir-là.
Mais je me suis rendue compte que j'avais à faire à une vieille connaissance.
L'oeuvre de Condé
J'avais en effet lu, Victorine, les Saveurs et les Mots (2006) il y a quelques années. J'avais trouvé son style très beau, envoûtant. Condé y parle de sa grand-mère, servante analphabète, d'un pays qu'on suppose être la Guadeloupe. Démunie face à beaucoup de choses, elle sait faire preuve d'un brio et d'une intelligence impressionnante dans son territoire, celui de la cuisine et des mets qui y sont confectionnés. Elle déchiffre des énigmes culinaires et fait preuve d'une inventivité sans borne. Condé se place en héritière de ce savoir, mais cette fois-ci dans le domaine littéraire.
C'est une jolie fiction sur la filiation et les origines, dont je garde encore aujourd'hui, un souvenir vivace.
J'avais essayé de m'attaquer à
J'ai aimé voir Maryse Condé, femme et amante, écrivain et mère de famille.
J'ai aimé l'entendre dire que pour elle:
"le travail d’une femme noire écrivain, c’est de transmettre aux autres un respect, un amour de la différence. Pour moi, c’est la beauté de mon travail et de mon origine. "
Condé représente un peu pour moi, un idéal et un exemple. Ce que je retire de ce reportage c'est qu'il n'y a pas de voie unique pour parvenir à la connaissance de soi-même. Finalement, le plus compliqué des combats pour une femme n'est pas tant de se faire accepter des autres (ce que j'ai longtemps cru) mais de s'accepter soi-même et de faire un pas vers soi.
Et pour ça, sortir des sentiers battus, et accepter de se remettre en question, et prendre le temps nécessaire à ça, est souvent un moindre mal.
Je pense qu'elle a amplement mérité le titre de beauté noire, non?
Pour en savoir plus
Sur Pluzz (replay gratuit pendant 7 jours des émissions de france télévision), il vous est possible pendant encore quelques jours, de voir ce joli portrait sur lequel le Point se penche aussi.
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